Je peux encore compter sur les doigts de la main les artistes qui m’ont fait chavirer au point de m’abandonner au trop plein d’émotions.
La première fois, pour un concert de Sigur Ros, j’étais du coté de Belfort et les notes de Popplagið m’avaient mis dans un état second.
2013 et troisième fois que je revois le groupe … Année d’un voyage prévu en Islande et impatience non contenue de faire découvrir leur éblouissante prestation à ma chère et tendre.
Installés dans les gradins parisiens du Zénith et après avoir supporté une première partie pour le moins poussive, les islandais apparaissent derrière un habillage scénique époustouflant de poésie. Derrière le rideau et les jeux de lumière, le chant d’un ange auxquelles se mêlent d’orgasmiques mélodies bruitistes. Le son est soigné. On arrive à entendre le souffle même des instruments. Les progressions sont marquées par une noirceur emprunte de nostalgie contagieuse. De cette pureté incroyable, mes émois se laissent aller totalement. Après une introduction inédite, les coups de tonnerre de I Gaer basculent l’assistance dans cette puissance ultime contrebalançant les précédentes suspensions temporelles. Complètement médusé par le spectacle, le public progresse dans un univers qui délaisse les deux derniers opus pour ne garder que les chants célestes et fracassants des premières œuvres.
Ny Batteri m’enveloppe de sa superbe alchimie et je me laisse dériver vers mes pensées les plus intimes … Je ne peux résister … De mes joues ruissellent des larmes avant que le rideau des ombres ne retombe sur la scène sous les cris de la foule. Je suis tout simplement heureux !
Vaka et les abysses de Saeglopur ne viennent pas perturber cet instant rare. L’univers auditif et visuel qui nous est offert s’approche de la perfection. On est ici dans le plus subtil des mélanges. Onirisme et progression vers les sommets les plus aboutis. Avec Olsen Olsen, le rythme est au ralenti. Le chant de Jonsi est un délice qui vous donne la chair de poule. E Bow et sa beauté triste me comble totalement. Un leitmotiv inhumain dans un parfait Vonlenska. La version de Varùd offre aux déesses d’Amina le soin de porter encore plus haut la voix de fausset du leader. Magnifique moment où les cordes, les cuivres et les voix laissent place au déploiement de décibels exquis tout droit sortis d’un archet et de colossales distorsions.
S’il fallait trouver une légère faille au programme, on pourrait ergoter en évoquant cette distance entre le groupe et le public. Salle parisienne sans doute blasée par les évènements répétitifs face à un groupe totalement ancré dans sa bulle artistique. Hoppipola et son outro incandescente viendront atténuer cette impression de carence connectique …
La tournée 2013 de Sigur Ros laissera le soin aux fans de découvrir quelques nouveaux titres. Parmi ceux-ci Kveikur … Titre qui laisse présager de futures aventures empruntes d’électroniques envolées. Des compositions plus sophistiquées mais qui se fondent parfaitement dans l’ambiance du moment.
En guise de rappel, la progression phénoménale de Svefn-G-Englar avant un dernier inédit et le cultissime Popplagið … Un final à l’image de ce concert : Entre les béatitudes les plus éblouissantes, la mélancolie la plus imprégnée de spleen et cette force magique que seuls les plus grands peuvent allier.
L’année 2013, l’année islandaise ne pouvait que mieux commencer.